CoSHSeM 2017 dans le Quotidien du médecin

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Denis Durand de Bousingen présente le CoSHEeM et les sciences humaines en santé au "Quotidien du médecin"

Des Sciences humaines en santé

Pour donner « aux étudiants les moyens de se remettre en question »

Denis Durand de Bousingen | 09.10.2017 | Quodien du Médecin

Timidement introduites dans la formation médicale en 1992, les sciences humaines constituent désormais une discipline obligatoire, de la PACES jusqu’à la troisième année, mais sont souvent enseignées au-delà, notamment aux internes de médecine générale. Réunis à Strasbourg durant trois jours, leurs enseignants ont réfléchi aux méthodes et aux enjeux de ces dernières pour la formation des médecins et pour la recherche.

« Un étudiant en médecine bien formé doit savoir que dans 20 ans, tout ce qu’il a appris aura complètement changé, et nous sommes là pour lui apprendre à se remettre en question », résume le Pr Christian Bonah qui, à la fois médecin et historien, préside le département d’Histoire des sciences de la vie et de la santé (DHVS) de la Faculté de médecine de Strasbourg.

Fort de sept enseignants secondés par de nombreux doctorants, le DHVS est la plus grosse structure de ce type en France, mais d’autres facultés comme Lyon, Paris Diderot, Angers ou Montpellier ont recruté elles aussi des enseignants spécialisés en « humanités ». Ailleurs, ces formations sont souvent assurées par des professeurs de médecine dont ce n’est pas la discipline principale. C’était d’ailleurs déjà le cas à Strasbourg depuis plusieurs décennies, et c’est cette riche tradition en histoire de la médecine qui a poussé la Faculté à développer plus fortement l’histoire que d’autres champs des sciences humaines.

Échange et de dialogue avec le patient

D’autres grandes facultés francophones, comme celle de Montréal, mettent en avant la littérature, notamment parce qu’elle permet de « mieux comprendre le vécu des patients », explique le Pr Vinh-Kim Nguyen, médecin et anthropologue dont le département associe même les patients à l’enseignement des sciences humaines. Quelle que soit la forme que prennent ces enseignements, ils doivent tous aider les médecins à jeter un regard plus critique sur leur pratique comme sur leurs attitudes générales, notamment en matière d’échange et de dialogue avec le patient.

Dans la plupart des facultés, les cours de sciences humaines ont lieu lors des premières années de formation : plus tard, les étudiants sont beaucoup moins motivés pour cela. À Strasbourg toutefois, une historienne participe à la formation des internes en médecine générale en partenariat avec des médecins enseignants. Les sciences humaines sont d’ailleurs très prisées des futurs généralistes, beaucoup plus nombreux à consacrer leur thèse à des sujets « sociologiques » que les internes hospitaliers plus centrés sur le « biomédical ». Cet intérêt des internes pour ces sujets, encore plus grand chez les femmes que chez les hommes, implique donc aussi qu’ils aient été suffisamment formés aux méthodes d’étude de recherche, afin d’augmenter la valeur scientifique de leur travail.

 

Des séminaires pour dépasser le « tabou » de l’erreur médicale

09.10.2017
 
Hantise des médecins, mais aussi « tabou » marqué par la honte, l’erreur médicale peut être aussi destructrice pour le médecin qui la commet que pour le patient qui est victime.

Depuis 2012, le Département de Médecine générale organise, trois fois par an, des journées pour aider les étudiants ayant commis une erreur, grave ou bénigne, à analyser et dédramatiser leur geste… pour mieux sécuriser leur démarche professionnelle future. Les étudiants sont formés dans l’idée que l’erreur est impossible, et surtout inadmissible, si bien que personne n’en parle : l’étudiant fautif est donc laissé seul face à lui-même, constate le Dr Jean-Luc Gries, l’un des trois généralistes responsables de ces journées. « Nous voyons arrivés des internes désespérés et culpabilisés, prêts à faire une croix sur leur carrière médicale, et le simple fait de leur permettre de parler les aide à comprendre ce qui s’est passé et à restaurer leur propre image d’eux-mêmes », explique-t-il. Ces journées doivent permettre de lutter contre « l’omerta de l’erreur » tout en rappelant que les erreurs individuelles s’inscrivent souvent dans le cadre d’une défaillance plus large de toute une équipe. Une compréhension de l’erreur permet d’en éviter le renouvellement et d’améliorer l’ensemble des pratiques.

Les médecins doivent aussi savoir échanger et communiquer sur ce thème difficile. Toutefois, observe le Dr Gries, les erreurs commises par les jeunes médecins lors des stages en cabinet sont encore plus difficiles à confesser et à dépasser que celles commises à l’hôpital. Quelques autres facultés de médecine, comme celle de Paris Est- Créteil, veulent elles aussi substituer à la « culture de la honte et du silence » une « culture positive de l’erreur ». Le philosophe Roberto Poma y est chargé, dès la PACES, de sensibiliser les étudiants aux dangers de « l’idole du risque zéro », et les invite à « accepter la possibilité de se tromper. C’est en reconnaissant la réalité de l’erreur qu’on avance, et non en ayant le culte de son éradication », conclut-il.

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